PROFILS | Publié : novembre 2016
Le corps blessé dans la littérature

Un projet de recherche traitant du corps blessé dans les littératures québécoises et canadiennes d’expression française entre 1945 et 2015 a été mis sur pied.
Dirigé par la professeure au Département d’études françaises, de langues et de littératures à l’Université de Saint Boniface (USB), Maria Fernanda Arentsen, le projet de recherche, qui s’étalera sur cinq ans, est possible grâce à un fonds de recherche du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH).
« Ce projet m’intéresse depuis longtemps, confie Maria Fernanda Arentsen. Il y a beaucoup de choses dans nos sociétés qu’on accepte sans se poser de questions, notamment le concept de personne normale ou anormale. En lisant sur ce sujet, je me suis rendu compte que la normalité est une construction culturelle. »
Dans le cadre de sa recherche, cette professeure veut donc comprendre d’où viennent les concepts de normalité et d’anormalité dans nos sociétés contemporaines. La littérature est un outil idéal pour retracer la pensée et les concepts d’une époque.
À partir de 1945, la représentation des personnes en situation de handicap, des corps blessés, devient plus importante dans la littérature d’expression française. Un peu plus tard, le concept de normalité est remis en question par des minorités qui se font de plus en plus entendre, dont les personnes en situation de handicap dès les années 1970.
Comment la littérature a-t-elle mis en circulation des stéréotypes de normalité? Comment a-t-elle contribué à l’idée de hiérarchisation sociale basée sur le corps, ou à l’inverse, comment l’a-t-elle remise en question en nous faisant mieux comprendre la complexité du monde et de la vie? Voilà des questions qui intéressent Maria Fernanda Arentsen.
Cette professeure sera assistée dans sa recherche par une doctorante en histoire de l’Université de Montréal.
Cette dernière étudiera les archives de journaux, d’hôpitaux et d’institutions pour personnes en situation de handicap afin d’en extraire les préjugés et les discours stéréotypés et réducteurs concernant les personnes en situation de handicap. « Nous pourrons ensuite comparer ces discours aux romans des mêmes époques, pour voir si la littérature encourageait ces préjugés ou plutôt les remettait en question », poursuit Maria Fernanda Arentsen.
« Il y a beaucoup de travail à faire, conclut-elle. Beaucoup d’œuvres littéraires que je vais étudier sont si bien écrites et célèbres que le lecteur ne les remet pas en question.
« J’espère que cette étude, menée dans un corpus littéraire, mais aussi dans d’autres textes, nous aidera à mieux comprendre l’origine de certaines idées et de préjugés qui circulent dans le discours social encore de nos jours. Au 21e siècle, il ne devrait pas être si difficile d’accepter que les personnes et leurs corps puissent être très différentes les unes des autres. »
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