PROFILS | Publié : février 2021
Il s'appelle Donatien

Il est d’origine burundaise. Il y a un an, il ne connaissait rien du Canada outre une brève leçon sur le climat, d’un banc d’école sans climatisation où le froid et la neige ne sont que concepts et images de livres. Donatien a fui le Burundi avec sa famille, qui s’est retrouvée éparpillée sur le continent africain. Lui, son grand frère et ses deux sœurs dans un camp de réfugiés en Tanzanie; ses parents, dans un autre pays… C’était il y a plus de cinq ans.
« La vie dans un camp de réfugiés est misérable, dit tout de même avec un sourire Donatien, en rencontre Zoom à partir de sa chambre de la résidence étudiante. On a le droit de travailler, mais en vérité, c’est du bénévolat. On ne peut pas tout faire ce que l’on veut dans un camp; il y a des règles. Mais j’ai tout de même pu finir mes études secondaires. Les cours étaient donnés gratuitement par une ONG [organisation non gouvernementale]. »
Donatien s’exprime couramment en quatre langues – enseignées obligatoirement dès la première année de l'école primaire au Burundi – soit le kirundi, le français, langue d’enseignement, l'anglais, langue de l’élite, et le swahili, avant tout parlé par les commerçants essentiellement en zones urbaines. Un jour, au camp, son attention s’est portée sur des affiches placardées un peu partout, portant sur le projet PER – Programme d’étudiants réfugiés – de l’organisme Entraide universitaire mondial Canada (EUMC), à la recherche d’étudiants qui veulent poursuivent leurs études.
« Quand j’ai vu que je répondais aux conditions requises, j’ai postulé! Après avoir fait ma demande, j’ai été convoqué tout d’abord à un examen écrit. Ayant réussi l’examen, j’ai ensuite fait un examen oral. Pour en arriver aujourd’hui au Canada, tout le processus a pris plus d’un an et demi à cause de la pandémie, alors que normalement c’est environ huit mois. Je devais arriver en aout, mais voilà que je suis arrivé à Winnipeg le 17 décembre 2020! »
Une fois sélectionné par le Programme d’étudiants réfugiés de l’EUMC, Donatien a suivi des ateliers de prédépart pour en apprendre davantage sur son pays d’accueil. Inscrit en Université 1, il s’intéresse aux sciences sociales et espère suivre le programme de travail social à l’Université de Saint-Boniface.
« Le projet PER permet un appui financier pour le récipiendaire, et ce, pendant 12 mois, souligne Robin Rooke-Hanke, coordonnatrice du Bureau international de l’Université de Saint-Boniface (USB). L’Université travaille de près avec l’AEUSB qui gère l’initiative. La population étudiante de l’USB cotise au projet chaque session. Aussitôt que les fonds atteignent un niveau suffisant, un autre étudiant peut être accueilli pour entamer ses études au Canada. La particularité de ce projet est que la personne parrainée arrive au Canda en tant que résident permanent, et non pas avec un statut temporaire muni d’un permis d’études. Le projet vise à appuyer ainsi un nouveau résident en lui permettant de faire des études dès son arrivée et de l’appuyer dans sa nouvelle vie dans son pays d’accueil. »
Ainsi, le personnel du Bureau international de même que des membres étudiants du comité d’Entraide universitaire mondiale Canada (EUMC) s’assurent de soutenir Donatien à tous les niveaux afin de faciliter son intégration rendue encore plus difficile à cause du confinement exigée par la pandémie. « Nous avons accueilli Donatien à l’aéroport le 17 décembre avec un masque et des mitaines, gracieuseté de la Pastorale de l’USB, mentionne Robin Rooke-Hanke. Puis nous l’avons transporté vers la résidence, où il a été confiné pendant ses 14 premiers jours au pays. Nous lui avons fourni toutes les nécessités, mais comme les rassemblements ne sont pas permis, les étudiants responsables de son accueil n’ont même pas pu lui faire visiter le quartier… »
« Toute cette situation m’a vraiment gêné, exprime candidement le Burundais. Enfermé, ne sachant même pas où j'étais, je me sentais seul et stressé. Ce qui m’a d’abord surpris, bien sûr, c’est l’hiver… la glace sur la terre, je n’avais jamais vu cela, je n’avais jamais senti le froid! Puis, ce qui m’est bizarre, c’est le mode de vie des gens; les gens vivent de façon individuelle, privée, alors qu’en Afrique, c’est la collaboration. J’ai été amusé, mais aussi inquiet. Vais-je m’adapter? Se faire des amis, c’est difficile… »
Une chose est claire à entendre Donatien parler, il ne laissera pas filer cette chance incroyable qui lui a été offerte de faire ses études supérieures à l’Université de Saint-Boniface. « C’est mon seul objectif! Je veux achever mes études pour avoir accès à une bonne vie. Je maitrise déjà l’accent de mes professeurs, j’ai réussi à me connecter à mes cours en ligne, j’ai bon espoir pour mon avenir et j’espère vraiment pouvoir étudier en travail social, car ce qui m’intéresse beaucoup, c’est d’interagir avec les gens, d’être avec la communauté, de travailler ensemble. »
Depuis le début de la participation de l’Université de Saint-Boniface au programme PER en 2009, la communauté étudiante de l’USB (avec l’appui de l’AEUSB, du Bureau de logement et du Bureau international de l'USB) a accueilli six étudiants réfugiés. Pour en apprendre davantage sur le Programme d’étudiants réfugiés, visitez https://srp.wusc.ca/fr/.
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